LES VICOMTES DE ROCHECHOUART

 Aymeric d’Osto-Francus, 1er vicomte de Rochechouart (965-1036)

A la fin du X siècle (975) et sous Hugues-Capet, vivait Gérard, cinquième vicomte de Limoges. Gérard eu de Rhotilde, héritière de la vicomté de Brosse, sa femme les enfants qui suivent : Guy, premier vicomte de Limoges; Hildeguire et Hilduin, qui furent successivement évêques de Limoges; Aymeric, surnommé Osto-Francus, guerrier fameux et tige des vicomtes de Rochechouart; Géraud d’Argenton; Geoffroi, abbé de Saint-Martial de Limoges, une fille nommée Adelmodie, qui fut mariée à Audebert, comte de Périgord et Asceline, mariée à Bozon,  comte de la Marche.

Si Osto-Francus obtint la vicomté de Rochechouart par sa bravoure, il serait ainsi le fondateur de la famille qui porte le nom de cette vicomté. S’il l’obtint en épousant Ave, fille et unique héritière de Guillaume, comte d’Angoulème, qui fut investi par Guillaume IV, duc de Guyenne, des vicomtés de Melle,d’Aunay et de Rochechouart. Cette dernière échut en dot à la femme d’Aymeric Osto-Francus. Nous aimons à partager ce dernier sentiment; et comme dans le Limousin et le Poitou les fiefs étaient féminins, c’est-à-dire qu’ils se transmettaient par les femmes, Ave aurait transmis le fief de sa vicomté à Aymeric son époux, qui légalement en aurait pris le nom. Voilà donc la tige ou l’origine des vicomtes de Rochechouart.

Dans un acte de 1048 on voit pour la première fois Aymeric de Limoges surnommé Osto-Francus, prendre le nom et le titre de vicomte de Rochechouart. Adhémar de Chabanais, Geoffroi du Vigeois et autres confirment que vers cette époque seulement cette famille a commencé à porter ce nom.Aymeric est qualifié dans une charte du temps : prince Aquitanien, à cause de la grandeur de sa maison. Par la suite les Rochechouart eurent le titre de premiers écuyers chrétiens; ils furent même appelés cousins par les princes et les rois. Pour ne plus revenir sur ces titres d’honneur, disons que le château de Rochechouart est qualifié dans beaucoup d’écrits de principauté, de duché, de marquisat; mais les seigneurs n’ont jamais pris que le titre de vicomte.

Les Rochechouart faisaient partie des sept familles les plus anciennes et les plus distinguées du royaume au moment où Hugues-Capet monta sur le trône. Aussi dans le Limousin donnait-on la palme à cette famille, d’après cet ancien adage: Rochechouart – triomphe.

Ces observations deviennent plus sensibles par l’énumération des belles alliances de cette famille.

En l’année 1001 il y eut, à cause du château de Beaujeu, un grand combat près de St-Junien , entre les frères Jourdain, seigneurs et princes de Chabanais, et les fils de Gérard, comte de Limoges, du nombre desquels était Aymeric Ostofrancus.

Hilduin, évêque de Limoges, était tourmenté par les incursions de Jourdain de Chabanais; pour s’en préserver il fit bâtir le château de Beaujeu, près de Saint-Junien. Jourdain, avec une troupe d’élite, s’empare du fort de Beaujeu. Irrité de son audace, Hilduin rassemble des soldats, appelle ses frères à son secours et marche contre Jourdain. Les deux armées se rencontrèrent près du château de Beaujeu; l’hiver sévissait avec rigueur ; mais rien n’arrêta la fureur des combattants, dont le choc fut terrible. Le sang coula en abondance et beaucoup de vaillants soldats furent tués. L’évêque de Limoges, vaincu et ses troupes taillées en pièces, prit la fuite, et le reste de son armée battit en retraite.

Jourdain, fier de sa victoire, s’en retournait emmenant une foule de prisonniers. Il était dans une grande sécurité, lorsqu’un chevalier captif le frappa sur la tête et l’étendit raide mort. Les soldats de Jourdain, furieux de l’assassinat de leur seigneur, se jetèrent sur les prisonniers et les passèrent tous au fil de l’épée. Peu de temps après, Jourdain Manzer, frère naturel du prince de Chabanais, surprit Aymeric de Rochechouart, le fit prisonnier, et le retint dans les fers jusqu’à ce que le château de Beaujeu fût entièrement détruit.

En 1018 ce même Aymeric fit, du consentement de sa famille, des dons à l’église de Saint-Pierre d’Uzerche, et y fonda des messes et des prières.

De l’union d’Aymeric Osto-Francus avec Ave naquirent deux enfants, Aymeric et Géraud.

Aymeric II (1036-1049)

Aymeric II épousa Ermensinde, fille unique et héritière de Foucaud, seigneur de Champagnac.

En 1037 cet Aymeric, du consentement de sa femme et de ses frères, marchant sur les traces de sa famille, fit des libéralités à l’abbaye d’Uzerche; mais plus tard il reprit tout par la force des armes, même les dons de son père.

Aymeric Il mourut assassiné. Les moines d’Uzerche prétendirent qu’une fin si malheureuse était une punition de Dieu pour les avoir dépouillés des dons de toute la famille et des dons qu’il leur avait fait lui-même. Ces moines demandèrent à Aymeric Il la restitution de tous ces biens; il refusa d‘abord; mais plus tard il les restitua de son plein gré, et leur fit lui même de nouveaux dons par une charte datée du château de Rochechouart (1068). Ce même Aymeric fit. de grandes générosités à l‘église de Saint-Junien, entre autres le droit de chauffage dans la forêt de Brigueil.

Du mariage d’Aymeric II et d’Ermensinde de Champagnat vinrent trois enfants : Aymeric, Hildegnire, seigneur de Champagnac par sa mère, et Rothberge, qui épousa Archambaud, vicomte de Comborn tige de la famille de Combron, qui créa la seconde famille des vicomtes de Limoges.

 Ayméric III (1049-1075)

 Ayméric III épousa Alpaïs de Salagnac, noble maison près du Grand-Bourg, en Limousin.

Ce vicomte de Rochechouart, entraîné par le mouvement religieux de l’époque, fit rebâtir le monastère de Saint-Sauveur, avec une belle église qui sert aujourd’hui d’église paroissiale à Rochechouart.

Aymeric IIl fit encore bâtir un couvent au Châtenet de Rochechouart; il y fixa la sépulture des seigneurs de sa maison, et y établit plusieurs religieux distincts de ceux de Saint-Sauveur mais du même ordre, pour célébrer un office perpétuel dans la chapelle qui renfermait les caveaux de sa famille. L’abbaye de Charroux fournissait les religieux nécessaires pour l‘un et l’autre couvent.

Nadaud nous apprend qu’au milieu du Xl° siècle Aymeric IIl fit rebâtir le château de Rochechouart sur un plan plus beau. Il devait en être ainsi; le plus puissant de la contrée devait  posséder le château le plus beau et le plus imposant. Tout ce qu’il y avait d’antique fut démoli, moins le donjon, qui est en pierre de taille; il se trouve à gauche en entrant dans le castel; sa hauteur dépassait celle des autres tours; il accuse une origine fort ancienne. On le regarde généralement comme une construction gallo-romaine.

Du mariage d’Aymeric III avec Alpaîs de Salagnac, naquirent quatre enfants : Aymeric , Audebert, qui fit beaucoup de donations à l’Église et à l’abbaye de Saint-Barthélemy de Bénevent, tant pour l’âme d’Alpaîs sa mère, d’Ascoline, comtesse de Salagnac, son aîeule, que pour celles de Hugues et de Renaud, vicomtes d’Aubusson, ses parents; Bozon, seigneur de La Salle; Maurice.

Aymeric IV (1075-1130)

 Aymeric  IV se maria avec Marguerite, fille d’Aymar V, en l’année 1090, donna quelques rentes à l’abbaye de Bouil, ordre de Cîteaux, et partit en 1096 pour la Terre Sainte, avec Gouffier de Lastours, Raymond de Turenne et autres seigneurs limousins.

Il se distingua au siège de Jérusalem et revint au pays; il mit alors sa maison sur un grand pied. Il avait ramené de ses longs voyages un lion, qu’il conservait vivant dans le fond des oubliettes de son château, et deux nègres, ce qui était alors un grand luxe. Des pages, des écuyers tranchants et d‘honneur le servaient et l’accompagnaient partout. La vicomtesse Marguerite était la joie et le bonheur de cette maison.

Le vicomte de Rochechouart Aymeric IV ne laissa qu’un fils unique, Aymeric.

Aymeric V (1130-1170)

Aymeric V eut un fils nommé comme son père Aymeric. Le nom de son épouse est inconnu. Ce seigneur fit partie de la croisade, à la tête de laquelle se trouvait Louis VII, roi de France et de celle que dirigeait l’empereur Conard. Il eut un fils nommé comme son père Aymeric.

Aymeric VI (1170-1230)

Aymeric Vl épousa Luce de Pérusse et fut vaillant soldat. Tout le monde sait que Richard- Coeur-de-Lion vint attaquer la tour de Chàlus pour s’emparer d’un prétendu trésor; que trente huit braves renfermés dans cette tour luttèrent courageusement contre toute l’armée anglaise, et que Richard trouva la mort au pied de cette tour. Les trois capitaines qui commandaient cette poignée d’hommes résolus à mourir sur la brèche et à s’ensevelir sous les ruines de la place, étaient sire de Rochechouart Aymeric VI, sire de Magnac-Laval et sire de Saint-Léonard. Le vicomte de Rochechouart échappa au massacre de Chàlus. Plus tard il fonda le prieuré de Trézon, sur la paroisse des Billanges.

Du mariage d’Aymeric VI naquit un fils, Aymeric, qui lui succéda.

Aymeric VII (1210-1243)

Aymeric VII.  Il était surnommé le Jeune, parce que, étant marié, il resta longtemps en la compagnie de son père. Il épousa en 1205 Alix de Mortemart, fille et unique héritière de Guillaume, baron de Mortemart, seigneur de St-Germain et d’Availles.

Par ce mariage les deux maisons de Rochechouart et de Mortemart se trouvèrent réunies.

La vicomptesse  Alix était fort belle et provoqua par ses charmes la passion du majordome du château. Elle est l’héroïne de la légende du tour du Lion.

Le vicomte avait un maître d’hôtel auquel il tenait beaucoup, et qui possédait toute sa confiance. Un jour ce mauvais serviteur rencontrant la dame seule, cherche à la déshonorer! Mais Alix le repousse et lui dit : Vous voyez que votre maître vous a confié toute chose dans le château, qu’il ne s’est réservé que moi seule; comment donc, violant toutes les lois de l’hospitalité et de l’honneur, pouvez-vous avoir la pensée de commettre un si grand crime?

Saisi de terreur, l’infâme prend la résolution de faire retomber le châtiment qu’il mérite sur la victime qui lui échappe. Il appelle tous les gens sous ses ordres, leur raconte avec feu la fable que lui suggère la perversité de son cœur. Depuis longtemps dit-il, il est obsédé par les sollicitations de la dame Alix; il a toujours résisté; mais il lui a fallu employer la force pour s‘en débarrasser. Il les appelle pour appuyer de leur témoignage l’accusation que sa conscience lui fait un devoir de porter devant leur seigneur et maître contre une femme indigne de son nom et de son affection.

Sans délai il se rond auprès du vicomte, et lui expose avec une hypocrite indignation le mensonge qu’il vient d’imaginer.

Aymeric, aveuglé par son orgueil blessé. Il ordonne au calomniateur de la jeter en pâture à un lion que l’on tenait enfermé dans la fosse de la tour qui porte ce nom.

Les ordres du seigneur furent exécutés avec empressement. Cependant le vicomte, tourmenté par le remords, torturé et dévoré d‘ennui, se repentait déjà d’avoir agi avec trop de  précipitation. Après trois jours de lutte contre une douleur d’autant plus terrible qu’il la croyait sans remède, il fait descendre dans la fosse un serviteur fidèle. Mais, ô toute puissance de Dieu! sa vertueuse épouse était pleine de vie; elle avait trouvé plus de merci auprès du lion que devant son époux.

En apprenant que sa femme avait été respectée par le lion, Aymeric voulut voir par lui même ce prodige; il appelle sa dame, elle lui répond! C’est elle! s’écrie-t-il; oui, c’est elle!Vite, à tout prix je veux la voir! Qu’on la retire ! Sa volonté est accomplie. Il se jette aux pieds d’Alix, lui demande grâce et pardon; il la prend dans ses bras, l’embrasse mille fois; de grosses larmes coulent de ses yeux. Il la prie de lui raconter ce qui s’est passé depuis trois jours dans ce souterrain. Cette vertueuse dame, sans lui faire aucun reproche, lui dit que, loin de lui faire aucun mal, le lion lui abandonnait une partie de sa nourriture et lui léchait les mains! Alix fit ensuite connaître à son époux les désirs criminels de son intendant.

O grand Dieu! s’écria le vicomte; Combien ce miracle fait éclater ta justice et l’innocence de ma vertueuse épouse. Et à l’instant il fit précipiter dans les oubliettes l’infâme économe, que le lion dévora en poussant des rugissements effroyables.

Pour perpétuer le souvenir de ce miracle, le vicomte de Rochechouart fit pratiquer une niche dans la tour même où sa femme avait été exposée à la dent meurtrière de la bête fauve; il fit placer dans cette niche un lion de pierre, et donna à la tour le nom de tour du Lion, qu’elle porte encore aujourd’hui.

Du mariage d’Aymeric VII avec Alix de Mortemart  naquirent trois enfants : Aymeric , Foucaud, seigneur de St-Germain Simon, seigneur d‘Availles par sa mère.

  Aymeric VIII (1243-1245)

 Aymeric VIII, vicomte de Rochechouart, était seigneur de Mortemart et de Pérusse. Il fit hommage pour la terre de Pérusse à Alphonse de France, comte de Poitiers, au camp devant Pons, au mois d’août 1242.

Il épousa Marguerite de Limoges, dame de Saint Laurent, fille de Guy, cinquième vicomte de Limoges, femme d’une grande beauté et d’un mérite qui la rendit célèbre dans ce siècle. Cette dame avait trois mille sous de rente. Plus tard, elle eut en héritage les forteresses et villes de Gorre, Oradour,Cussac, Cussaret, Champnier, la forêt de Tren et la moitié du domaine de Marval.

Marguerite était petite fille d’Henry Ier et cousine d’Henry Il, rois d’Angleterre; les enfants qu’elle eut d’Aymeric VIII étaient arrière-petits-fils des rois anglais de la famille des Plantagenet. Plusieurs Rochechouart avaient épousé des princesses anglaises.

Aymeric VIII mourut le 25 août 1245; il fut enterré au couvent du Châtenet. Marguerite mourut quatorze ans après; elle fut inhumée auprès de son mari.

De ce mariage vinrent neuf enfants : Aymeric, Guillaume de Rochechouart-Mortemart, qui fut la souche de la branche des Mortemart, dont l’éclat surpassa son aînée en dignités, en honneurs et en fortune. Guy, archidiacre de Limoges puis seigneur de Saint-Laurent. Simon, chanoine de Limoges puis  archevêque de Bordeaux. Aymar, seigneur de Châtelus. Foncaud, chanoine de Limoges. Agnès, qui épousa en premières noces Guy de La Rochefoucauld, dont sont issus les ducs de La  Rochefoucauld, et en secondes noces le seigneur Tors de Fronsac; elle eut pour dot les terres de Chéronnac. Marguerite, à qui sa mère voulut faire embrasser la vie monastique, mais qui épousa Aymar, seigneur d’Archiac. Aliénor ou Alix, mariée à Geoffroi de Mortagne, seigneur de Lespare et de Madaillan.

On croit que la vicomtesse de Rochechouart Marguerite de Limoges se maria en deuxième noces avec Archambeau, premier comte de Périgord.

Aymeric IX (1245-1283)

 Aymeric IX se maria en 1251 avec Jeanne de Tonnay Vivonne, fille unique et héritière de Geoffroy, seigneur de Tonnay-Charente, diocèse de Saintes.

Ce seigneur avait commis plusieurs violences contre les hommes de la Chapelle-Blanche, qui relevait du chapitre de Limoges; il avait même saisi leurs biens. De La Serre, évêque de Limoges, assujettit ce vicomte, sa famille et ses gens, aux censures de l’Église.

En 1264 Aymeric IX eut une discussion avec le seigneur de Châlus-Chabrol. On parlementa, mais la dispute n’en devint que plus vive. Pour couper court, Aymeric envoya un héraut d’armes signifier son ultimatum au seigneur de Châlus. Celui-ci ne l’ayant pas accepté, la guerre fut déclarée. Aymeric mit sous les armes tous ses vassaux, convoqua le ban et l’arrière-ban. Le lieu de rendez-vous général fut Biennat. Le jour du départ, le vicomte se lève de grand matin, se met à la fenêtre, et croit apercevoir dans la une un lion qui dévorait une cavale. Pour lui c’était un signe certain de victoire, et il partit joyeux à la tête de son armée. La forteresse de Châlus fut prise et saccagée.

En l’année 1263, Jeanne de Tonnay-Charente, épouse d’Aymeric, étant morte en couches, fut inhumée au couvent du Châtenet.

 Aymeric épousa, en secondes noces Mathilde de Anglia, veuve de noble Guillaume de Fors. Mathilde de Anglia, vicomtesse de Rochechouart, grande amie des frères, mourut le 11 mars 1264; elle ne resta mariée que quelques mois.

De son vivant Aymeric IX partagea ses biens entre ses enfants; Aymeric, l’aîné, eut le château de Rochechouart, et Guy, le cadet, celui de Mortemart. Plusieurs font remonter à ce Guy de Rochechouart, et non à Guillaume, comme nous l’avons dit plus haut, l’origine des Rochechouart-Mortemart. Ce Guy fit placer sur son château de Mortemart une lionne en pierre semblable au lion du château de Rochechouart.

Aymeric mourut le 17 octobre 1280, et fut inhumé, selon une pratique religieuse très commune dans ces temps-là, avec l’habit des frères mineurs. Il légua à ceux de St-Junien treize tuniques et une réfection pour la somme de quinze livres tournois à prendre sur ses fours et moulins de Brigueil, et leur confirma l’usage perpétuel du bois dans la forêt de ce nom.

Ses enfants furent : Aymeric , Guy, Simon, qui devint vicomte de Rochechouart après Aymeric son neveu, mort sans postérité. Ce Simon continua la branche aînée ; Foucaud, mort archevêque de Bourges le 7 août 1343; Guillaume, chanoine de Limoges et de Bourges; Jeanne, qui épousa Pons de Mortagne, vicomte d’Aulnay : Marguerite, mariée à Arnaud Bochard, damoiseau; Ahélide,Isabelle,Marquise, toutes trois religieuse à l’abbaye de la Règle, de Limoges.

 

Aymeric X (1253-1280)

 Aymeric X, vicomte de Rochechouart, seigneur de La Cossière. Il vivait sous le règne de Philippe III et suivit son père à l’Ost-de-Foix, en 1271. Il épousa Marguerite, fille du vicomte de Limoges, et fit un testament par lequel il légua aux frères mineurs de Saint-Junien treize livres de rentes. En 1274 il offrit, pour défendre les intérêts du roi d’Angleterre, un duel qui n‘eut pas lieu. Il était, en 1283, du nombre des chevaliers bannerets que le roi de France retint pour aller en Arragon. Il fut inhumé chez les frères de Saint-Junien, avec l’habit de leur ordre, le 29 septembre 1289.

Il laissa deux enfants : Aymeric qui lui succéda, et Jeanne, mariée à un Châtillon, fils de Pons de Châtillon. Elle mourut sans enfants, et institua pour héritier Simon de Rochechouart son oncle, vicomte de Rochechouart.

Aymeric XI (1283-1307)

Aymeric XI, vicomte de Rochechouart, seigneur de la Coissière, de Brigueil, de Lériflans, etc.

Aymeric XI octroya à la ville de Rochechouart une charte d’affranchissement. Il le fit d’autant plus volontiers que l’extrême indigence de ses hommes ne leur permettait plus de payer les impôts. Par cette manumission ou charte d’affranchissement du seigneur vicomte, Rochechouart, fut érigée en commune. Quatre consuls furent établis pour diriger la ville; le seigneur nomma les premiers, ceux-ci en sortant de charge nommaient eux-mêmes leurs successeurs, en présence de tout le peuple convoqué.

Cette charte est un curieux monument pour les habitants de Rochechouart; elle leur permet de comparer le passé au présent, et fait essentiellement partie de leur histoire. C’est de cette charte que date la fondation proprement dite de la ville de Rochechouart, l’ère de la liberté pour tout ce pays, l’origine de sa bourgeoisie.

Deux ans après avoir octroyé cette charte, le vicomte Aymeric XI se maria avec Alias Galmoise, fille de feu noble Elie Rudel, chevalier, seigneur de Bergerac, et sœur de Réné de Pons, seigneur dudit Bergerac.

Peu de temps après son mariage, la santé d’Aymeric se délabra. Lorsque la neuvième année fut sonnée, il mourut sans postérité et fut enterré, le 10 septembre 1307, dans l’église des frères mineurs de Saint-Junien, avec l’habit de l’ordre.

La ligne directe de la maison de Rochechouart fut interrompue par sa mort.

Simon (1307-1316)

Simon, fils d’Aymeric IX et de Jeanne de Tounay-Vivonue. Il succéda à son neveu. A l’âge de onze ans, et du vivant de son père, il avait pris l’habit des frères prêcheurs et fait chez eux trois professions : à Toulouse, entre les mains de l’évêque; à Montauban ou à Alby, et à Cahors. Il était demeuré trois ans parmi les religieux. Ses professions furent déclarées nulles par sentence des commissaires de l’évêque de Limoges. Il fut ensuite absous par le pape, qui lui accorda la permission de se marier.

Simon était vicomte de Rochechouart, seigneur de Saint Auvent, de Saint-Laurent-sur-Gorre, de La Cossière, de Brigueil, de Saint-Cyr, de Cognac, de Saint-Victurnien, de Gorre, de Champagnat, d’Oradou-sur-Vayres, de Chaillac et autres lieux. Il était chevalier.

En 1303 il fut nommé connétable de La Rochelle et seigneur de Tonnay-Charente. Il servit le roi à la guerre de Flandre, en 1304, et se trouvait, avec Philippe-le Bel, à la bataille de Mons-en-Puelle, où il se battit en vrai soldat.

Simon avait épousé, avec dispense du pape, à cause de parenté, Laure de Chabanais, fille d’Aymeric de La Roche et d’Adélaïde Guy-Posta , sa cousine. Par contrat en forme, Laure, vicomtesse de Turenne, fait donation de tous ses biens aux deux époux Simon de Rochechouart et Laure de Chabanais , qui était petite-fille de Laure, vicomtesse de Turenne sa tutrice.

De ce mariage vinrent quatre enfants : Jean, Aymeric, qui fut seigneur de Chabanais; Isabeau, mariée à Jean de Chauvigny, chevalier, seigneur de Levroux, Neuvi et Pailloux; Jeanne, religieuse à Poissy.

Rochechouart possédait en 1316, sous Simon, une aumônerie ou Maison-Dieu, qui fut convertie en hôpital en 1353.Le prieuré de Saint-Saveur donnait les soins religieux. Aujourd’hui le couvent et l’hôpital se trouvent dans une grande maison, au bas de la ville, faubourg Bereau.

Jean Ier (1316-1356)

Jean I“, vicomte de Rochechouart, seigneur de ‘Tonnay-Charente, de Brigueil, Saint-Auvent, Chaillac et autres lieux, chevalier, chambellan du roi en 1335. Il fit son testament, par lequel il choisit sa sépulture dans l’église des frères prêcheurs de Saint-Junien et dans le tombeau de son père; mais, contre son attente, il fut enterré à Poitiers .

Il fit des dons à la fabrique de Saint-Auvent, épousa, en 1336, Jeanne de Sully, dame de Maupas et de Brion, fille de Henri de Sully, grand bouteiller de France, et de Jeanne-Marguerite de Bourbon-Vendôme. Elle lui porta en dot la terre de Courbeffin et trois cents livres de rentes, eut des lettres de sauvegarde en 1356, testa le jeudi avant la Nativité, en 1376, voulut être enterrée à Coroy, près de ses parents, et fonda une vicairie dans le collége de Sully.

En 1341, son oncle Foucaud, archevêque de Bouges, lui « donna les hôtels vieil et nouveau, qu’il  avait à Saint-Germain-des-Prés, appelés le Corbier, à la charge des cents dûs à l’abbaye de  Saint-Germain-des-Prés ».

En 1356 Jean de Rochechouart assista à la fameuse bataille de Crécy, où les Anglais remportèrent la victoire. Il avait réuni toutes ses forces pour marcher contre ces terribles ennemis de la France. A la désastreuse bataille de Poitiers (29 septembre 1356), sire Pierre Tison de Cramaud, brave officier, portait la bannière de Rochechouart. Il était frère de Simon de Cramaud, qui depuis fut cardinal. La bataille de Poitiers fut perdue, l‘armée française défaite, le roi Jean fait prisonnier. Le vicomte de Rochechouart fut trouvé mort parmi ceux des chevaliers qui avaient fait longtemps de leurs corps un rempart au roi. Il fut enterré dans l’église des Jacobins de Poitiers, près du duc de Bourbon. Son écu était placé dans le chœur, le premier à droite.

Du mariage de Jean de Rochechouart et de Jeanne de Sully provinrent  : Louis, Jean, qui fut archevêque de Bourges puis d’Arles ; Aymeric, qui devint lieutenant-général en Guienne. Il se rendit coupable de rébellion en prenant le parti des Anglais ; Foucaud, seigneur de Saint-Laurent ;Isabelle ; Henriette, Marie , religieuses.

Louis 1er (1356-1394)

Louis, vicomte de Rochechouart, chevalier, seigneur de Saint-Auvent, de Tonnay-Charente, de Brion, de Corbeflin, de Maupas, de Fontaine-de-Burle, de Jars, de Mauze, etc.

Son sceau est un fascé en ondes, cimier et une tête de licorne. Il était chevalier banneret. Eu égard aux services rendus par son père et aux dommages soufferts, le roi lui donna le gouvernement de la ville deTonnay-Charente. Il fut capitaine-gouverneur du Limousin pour le roi et le régent de France.

En 1359 il fut chambellan du roi Charles V, qui, par lettres patentes le qualifia de cousin. Pendant qu’il était au service du roi, il établit pour son lieutenant en toutes ses terres Alain de Montendre. Le 13 septembre 1363, il rendit hommage, pour la terre de Rochechouart, à Edouard, fils aîné du roi d’Angleterre, suzerain de Rochechouart par le traité de Brétigny.qui donnait aux Anglais les terres de cette vicomté.

En 1362 Louis fit bâtir une église entre la tour du château et le rocher sur lequel est planté aujourd’hui la croix de Mission. Cent ans après cette église eut le titre de succursale, sous le nom de Notre-Dame du-Château. Quelques vicairies y furent fondées; une, entre autres, par l’abbé Bertrand Chemison, le 19 février 1512. Cette église fut démolie en 1576.

Par suite de cette démolition, Jean de Rochechouart fit construire une chapelle dans l’intérieur du château, au sud. Ce lieu est en ruines; on y voit des restes de peintures murales.

En 1363 Louis, revenant de Poitiers, où il avait été forcé de se rendre pour faire hommage à Edouard d’Angleterre, dit a ses chevaliers : « Mes amis, des temps meilleurs viendront; nous combattrons encore sous nos chères fleurs de lis. » Ce propos fut rapporté à Édouard, qui, sous quelque prétexte, appela Louis à Angoulême, et, sans vouloir lui donner audience, le fit jeter dans un cachot.

Aussitôt libre, le vicomte ne fit pas attendre sa vengeance: il abattit de ses propres mains l’étendard anglais qui flottait sur la tour principale du château, fit prendre les armes à tous ses vassaux. et leur dit : « Mes féaux, j’ai horreur des Anglais, je les déteste, je les abhorre. Jamais ils ne seront dans mon coeur! Le traité de Brétigny a été imposé par la force; il est nul de plein droit. Mourir mille fois plutôt que d’appartenir aux Anglais! Venez à moi et combattons pour notre indépendance et pour notre roi. Pour moi, je vous le déclare et vous le jure, je m’ensevelirai sous les ruines de ma citadelle plutôt que d’y voir encore la bannière anglaise. Mort aux Anglais! Que ces paroles soient notre cri de ralliement!» Et tous les vassaux de s’écrier : Mort aux Anglais! cri répété avec le plus vif enthousiasme par tous les guerriers.Informé des mauvaises dispositions de Louis de Rochechouart, Edouard vint en personne mettre tout à feu et à sang sur les terres du vicomte; mais il ne put le forcer dans sa place. Après en avoir examiné avec soin les fortifications, il craignit de compromettre sa réputation en essayant de forcer la place, et jugea prudent de se retirer. Les seigneurs poitevins, enhardis par l’exemple du seigneur de Rochechouart, abandonnèrent peu à peu le parti des Anglais pour revenir au roi de France.

Le vicomte Louis de Rochechouart se maria deux fois; d’abord à Marie de Treignac de Javancy, dame de Javerlhiac et de Haute-Corne (leur contrat de mariage est du jour de Sain-Malhieu 1355; cette dame mourut le 6 novembre 1360);ensuite à Isabeau de Parthenay d’Aspremont, fille de Guy Larchevêque, seigneur de Soubise, de Guienne et de Laval Couhé.

Les enfants du premier lit sont : Jean, Foucaud, auquel sou aieule, Jeanne de Sully, donna la terre de Brion. Il fut grand prieur de France en 1446 et abbé de Saint-Thierry du Mont-d’0r, de Reims; Isabeau, dame de Brigueil, qui épousa Guillaume Albert, chevalier, seigneur de Mourat  puis Jean, vicomte de Villemure, et enfin Guillaume Gueuaud, sieur des Bordes, chevalier.

Du second lit naquirent  Louis, fut seigneur d‘Aspremont, d’Azai, de Brion; Jean, seigneur de Galardon, de Laniotte-Bigot et de Bançay; Isabeau, qui après la mort de son frère Jean se qualifiait dame de Bançay et de Galardon; laquelle, sous cette qualité, et de veuve de Renaud Chabot, chevalier, seigneur de Jarnac, avoua le 3 août 1471, de Jean de Rochechouart, lors seigneur de Ganegnolle et depuis de Mortemar, la seigneurie de Lamotte-Bigot. De cette alliance est sorti l’amiral Chabot; Jeanne, prieure de Saint-Denis-d‘Oleron, morte abbesse de  la Règle à Limoges, en 1414.

Jean II (1394-1413)

 Jean II, vicomte de Rochechouart; seigneur de Tonnay-Charente, Javerlhiac, Charot,. Dubourdet, Pensol, etc. Il fut conseiller et chambellan du roi, qu’il vint servir au siège de Bourbourg, avec un chevalier et huit écuyers de sa compagnie, le 6 août 1383; fut retenu, le 28 octobre même année, avec cent hommes d’armes, pour la garde des châteaux et forteresses que le roi tenait en Saintonge et en Angoumois; en 1404 il l’accompagnait à la guerre de Flandre.

Il avait été marié, du vivant de son père, avec Eléonore de Mothefelon, dame de Jars, de Bréviandre, Yvoix-en-Berri, Morogue, Malvoisine, Maupas, Lachapellette, etc., seconde-fille  de Thibaud, seigneur de Mothefelon et de Durestal, et de Béatrix de Dreux, princesse du sang royal de France.

Il provint de ce mariage : Geoffroi, Jean de Rochechouart, seigneur de Jars, sieur de Charroux, qui a fait la branche du Bourdet, éteinte en 1708; de Champnier, éteinte en 1696; de Jars, éteinte en 1649; du Monceau, éteinte en 1744; de Châtillon-le-Roi, éteinte en 1621; et celle de Clermont-Fodoas, qui probablement existe encore; Simon de Rochechouart, chevalier , seigneur de Bréviandre, d’Ancourt , Morogue, Maupas, etc.; il laissa ses biens à Geoffroi de Rochechouart, son neveu, par donation du 10 juin 1446; Marie, qui épousa Louis, seigneur de Pierre-Buffière; Louis ; on ignore ce qu‘il est devenu.

 

Geoffroi (1413-1440)

 Geoffroi, vicomte de Rochechouart, seigneur de Tonnay-Charcute, d’Autraives, des Fontaines, de Puy-Jarreau et de Burle. Il vivait sous le règne de Charles VII; il servit le roi en Guienne en qualité de chevalier-bachelier, avec un autre bachelier et neuf écuyers de sa compagnie. Le 4 août 1405 il donna quittance de quatorze cents livres au trésorier des guerres. Le 12 août 1413 il fut reçu en qualité de banneret à St-Jean-d’Angely, avec un chevalier-bachelier et huit écuyers de sa compagnie.

Il épousa Marguerite Chenin, veuve de Guillaume de Rochechouart-Mortemart son parent, et fille de Jean Dangle. Leur contrat de mariage, passé à Monpipeau, dans l’Orléanais, est du 24 janvier 1400. Il fit partage avec ses frères le 30 août 1419, devint veuf en 1436, et mourut peu de temps après.

De ce mariage naquirent : Foucaud, Jeanne, mariée au mois de juillet 1427 à Foucaud, seigneur de La Rochefoucauld, d’où sortirent les ducs de ce nom ; Agnès, mariée au mois de mars 1430 à Léonard-Bernard de Maumont, chevalier, seigneur de Saint-Christophe-de-Libourneau, fils aîné de Jean, seigneur de Tonnay-Boutonne, et de Marguerite de Loudun ; Autre Jeanne ;Louise ;Jacques.

Foucaud (1440-1472)

Foucaud, vicomte de Rochechouart, seigneur de Tonnay-Charente et de Mauzé.  Il vivait sous Louis XI, dont il était chambellan. Le 3 octobre 1448 il fut reçu chevalier du Camail, ordre de chevalerie des ducs d’Orléans. Quelques années auparavant il avait été gouverneur de La Rochelle. Il prit part aux négociations des conciles de Bâle et du pape Eugène IV, servit très activement le roi à la conquête de la Guienne sur les Anglais en 1451, et lui rendit hommage à Saintes, le 7 août 1461, pour la vicomté de Rochechouart. Il assista aux États tenus à Tours le 6 avril 1468, mourut maréchal de Guienne en 1472, à Tonnay-Charente, et fut, ainsi qu’il l’avait ordonné, porté et inhumé au château de Rochechouart. Le chapitre de Saint-Junien assista en corps à ses funérailles, avec tous les prêtres des environs.

Ce vicomte, d’après les chroniques locales, perdit beaucoup d’argent au jeu. Louis XI, qui ne démentit jamais sa réputation de prince ombrageux et jaloux, et dont la politique était d’abaisser les grands, se servit d’un prétexte assez insignifiant en apparence pour humilier le vicomte de Rochechouart. Ils jouaient ensemble aux échecs; le vicomte Foucaud, qui avait son jeu mieux en ordre, dit au roi en plaisantant: Mes tours sont mieux que les vôtres. Tant pis pour vous, répliqua le roi; mes tours doivent être les plus belles et les plus fortes du royaume.  Pourtant, reprit le vicomte, les tours de mon jeu, comme celles de mon château, sont plus belles et en meilleur état. Le roi, piqué de ces paroles, abandonne le jeu brusquement et envoie des commissaires à Rochechouart pour vérifier le fait. Ils lui rapportent qu’en effet les tours du château de Rochechouart sont plus élevées que les tours des châteaux du roi. Furieux d’une pareille insolence, le roi ordonne aussitôt que les tours de ce seigneur seront abaissées de façon que les tours des châteaux royaux soient les plus belles et les plus élevées de France.

Le seigneur Foucaud avait épousé en premières noces Marguerite de La Rochefoucauld, décédée sans enfants; il épousa ensuite Isabeau de Surgères, fille de Jacques, seigneur de Laflocelière, chambellan du roi, et de Marie de Sillé. Leur contrat est du 29juillet 1439.De ce mariage naquit une fille, qui fut nommée Anne.

Anne, vicomtesse de Rochechouart, fille unique de Foucaud de Rochechouart et d’Isabeau de Surgères.  Isabeau, mère de la vicomtesse Aune, se maria en secondes noces (1473) avec noble homme Guillaume de Pontville, écuyer, seigneur de Saint-Germain et de la Plouzière. Elle transigea avec Anne sa fille, le 9 octobre 1473, pour son droit de douaire sur la seigneurie de Mauzé.

Guillaume de Pontville, mari d’Isabeau, était veuf lors de son mariage avec cette dame. Il avait de son premier mariage un enfant, Jean de Pontville , déjà chambellan du duc de Guienne frère du roi Louis XI. Guillaume de Pontville et sa femme Isabeau trouvant que la jeune vicomtesse Aune serait un beau parti pour le jeune Pontville, cherchèrent à faire réussir cette alliance. Ils firent intervenir le roi et son frère.

Personne de la famille n’osa résister à de si puissants protecteurs. Aune fut, par autorité du roi Louis XI et du duc de Guienne son frère, mariée à noble et puissant seigneur Jean de Pontville, vicomte de Breuilhèz, écuyer, conseiller et chambellan du duc de Guienne, sénéchal de Saintonge, capitaine de la ville et château de St-Jeaud’Angely. Leur contrat de mariage fut passé à Mauzé le 21 août 1470. Furent témoins : Jean de Beauvais, évêque d’Angers et chancelier de Guienne; Jean de Montalembert, élu à l‘évéché de Montauban; Jean de Rochechouart, seigneur de Mortemar, créé chevalier au siège de Fronsac, en 1455, et plusieurs autres seigneurs. En faveur de ce mariage, le duc de Guienne promit au jeune Pontville de lui assigner à perpétuité deux mille livres de rente. Il lui avait déjà fait acquérir la vicomté de Breuilhèz, diocèse de Condom, estimée alors mille livres de rentes; il lui donna encore trois mille écus. Par le contrat de mariage, Pontville devait, ainsi que ses descendants, porter le nom et les artnes de Rochechouart, à peine de mille livres de rentes par lui payables à celui des Rochechouart qui devait lui succéder s’il mourait sans héritiers. Le seigneur de Pontville remplit exactement cette clause. Dès la date du contrat ou ne le trouve plus que sous le nom de Jean, vicomte de Rochechouart.

On ne sait rien de l’origine du seigneur de Pontville; mais son alliance avec la riche héritière de Rochechouart fait voir qu’elle était assortie. Le nouveau vicomte fut ambassadeur à Rome et chambellan du roi. La sœur de ce prince le dépêcha pour venir, le 29 août 1487, annoncer au parlement la reddition d’Orléans. Il fut à Rome ambassadeur et ministre plénipotentiaire pour Mme  de Beaujeu, sœur du roi. On avait conservé au château de Rochechouart des actes qui prouvaient la noblesse et la naissance du vicomte de Pontville, seigneur de Montbazon, de Torçay, de Saint-Léger-la-Montagne, de Chabanais, de Judan, etc.

Après leur mariage, Jean de Rochechouart-Pontville et la vicomtesse Aune vinrent habiter leur château de Rochechouart; la noblesse du pays s’y rendit pour assister aux fêtes qui eurent lieu à cette occasion. Il existe encore dans une chambre située près de la tour du Lion, un souvenir de ces fêtes: c’est une fresque représentant une grande chasse au cerf, peinte, dit-on, par ordre du seigneur de Pontville. La fidélité des costumes et l’ancienneté de cette fresque font toute sa valeur.

L’artiste semble vouloir indiquer, par les bustes des jeunes époux dessinés en face d’une petite croisée à droite de l‘entrée de la tour, qu’ils sont l’âme des réjouissances dont il doit perpétuer le souvenir.

Jean de Rochechouart-Pontville (1470-1499)

Jean de Rochechouart-Pontville avait donné en 1494, au collège de Montaigu, à Paris, deux cent quarante livres de rente. Depuis cette époque jusqu’à la révolution de 89, la maison de Rochechouart disposait dans ce collège d’une bourse dont M. X… profita le dernier, sur la présentation de dame Marie-Victorine Boucher, dernière vicomtesse de Rochechouart.

Le vicomte Jean de Rochechouart-Pontville fut un des seigneurs qui ratifièrent le traité d’Etaples, à Nantes, le 15 janvier 1498.

Vers ce temps on voit un Rochechouart, chevalier de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, avec le chevalier Blanchefort, conduire à Bourganeuf, demeure des grands prieurs d’Auvergne, Zizime, frère de Bajazet, empereur des Turcs. La tour et les bains construits pour ce malheureux prince existent encore.

Le 20 juillet 1498 le chapitre de Saint-Junien fit un présent de cinquante à soixante sous d’or au fils du vicomte de Rochechouart et à sa dame, pour le joyeux avènement d’un fils dont elle était accouchée. Quelques années après, ce chapitre fit dire une messe solennelle pour ce même fils trépassé.

Anne de Rochechouart, épouse de Jean de Rochechouart-Pontville, mourut en 1494 et son mari en 1499, laissant deux enfants : François ; Anne qui épousa, en 1494, son cousin Aymeric XV, de Rochechouart-Montemart, fils de Jean et de Marguerite d’Amboise.

 

François de Rochechouart-Pontville (1499-1523)

François, vicomte de Rechechouart-Pontville, né en 1475,seigneur des Landes, de Breuilhèz, baron de Mauzé, Tonnay-Charcute, etc. Il eut, par résignation de son père, l’office de sénéchal de Saintonge, et fut nommé capitaine de Saint Jean-d’Angely, par lettres datées de Blois, le 26 mars 1498.

Il assista avec son fils à l’élection de Jean de Reillac, seigneur de Brigueil, nommé prévôt de Saint-Junieu par ordre du roi Louis XII.

Vers la même époque il vendit la principauté de Tonnay-Charente au seigneur de Mortemart.

Il s’était marié le 25 janvier 1493 avec Renée d’Anjon, fille de Louis, bâtard du Maine, baron de Mézières, et d’Anne de La Trémouille. Elle avait en en dot quinze mille livres et la terre de Neuvic-le-Paleux , en Berri. Cette dame mourut vers le commencement de l’année 1510. Le seigneur pria les membres du chapitre de St-Junien d‘assister aux funérailles de la vicomtesse sa femme. Ils y vinrent en corps et y portèrent douze torches.

De ce mariage survinrent deux enfants : Bonaventure, mort sans enfants en 1525; il donna son bien à son frère du second lit; Françoise, mariée à Renaud de La Touche, seigneur de La Touche-Limousinière.

Peu de temps après la mort de la vicomtesse Renée, François de Rochechouart épousa en secondes noces Jacquette de La Rochefoucauld sa parente, fille du baron François de La Rochefoucauld et de Louise de Crussol. Elle eut en dot vingt-trois mille livres. Elle était dame d’honneur de la reine. Jeaquette de la Rochefoucauld  lui donna également deux enfants : Claude, qui succéda à son père, et Louise, qui épousa Guillaume de Dinteville, chevalier, seigneur des chenets, bailli de Troyes .

Les Mortemart voulurent, dit-on, empêcher François de Pontville de porter le nom de Rochechouart. Mais, dans le duché d’Aquitaine, les fiefs étaient féminins, c’est-à-dire qu‘ils pouvaient se transmettre par les femmes; c’est ainsi qu’Eléonore d’Aquitaine avait transmis le sien d’abord au roi de France, et ensuite au roi d’Angleterre. Les démarches des Mortemart furent sans succès ; les Pontville ont toujours porté publiquement le nom et les armes de Rochechouart, depuis le contrat de mariage du 21 août 1474, jusqu’au dernier des Rochechouart, mort en 1839.

François de Rochechouart-Pontville fit assassiner M. Pierre de Bermondet de Cromières, lieutenant-général du sénéchal de Limoges, président au siège présidial de Limoges, seigneur de Saint-Laurent-sur Gorre, de Panazol, de La Quintaine et de Plaine-Vayres.

Le 2 avril 1513 le seigneur de Pontville , qui passait pour être un peu jaloux, était parti pour la chasse, selon son habitude, lorsque M. Bermondet de Cromières vint lui rendre visite; il fut reçu par la vicomtesse en l’absence de son époux.

de Cromières avait de très belles mains, et justifiait, sous tous les rapports, la réputation des Bermondet, depuis longtemps surnommés les beaux Cromières. Prié de s‘asseoir à la table de la vicomtesse, «il ne crut pas pouvoir décliner l’honneur d’une pareille invitation. Le vicomte n’arrivant pas, l’on se mit à table, et M. Bermondet partit un peu avant le retour du seigneur. A son arrivée la dame lui fait part de ce qui s’est passé, et des regrets de M. de Cromières de ne point l’avoir rencontré; elle lui parle avec enthousiasme de l’élégance du marquis, de la beauté de ses mains, du plaisir que lui a fait éprouver sa visite. M. de Pontville écoute avec impatience les éloges donnés au visiteur; le venin de la jalousie s’insinue dans son cœur, lui trouble l’esprit. Il sort brusquement, ordonne au chef du poste militaire de faire monter à cheval Anizi, Lachapelle, Indant et Lenègre, s’élance avec eux, aiguillonné par la colère, atteint sur la place de Saint-Laurent-sur-Gorre M. de Cromières, qui, l’ayant aperçu , s’avançait avec politesse pour le saluer; fait un signe à ses cavaliers, et l’infortuné magistrat tombe sous leurs poignards! Le farouche vicomte descend alors de cheval, coupe une main de sa victime, la place dans une boîte, revient à Rochechouart, entre dans la chambre de son épouse, couvert de poussière et de sang, et lui présente l’horrible trophée en disant: Madame, voici l’objet de votre admiration, de votre idolàtrie !…

C’est la belle main du marquis de Cromières… La pauvre femme s’affaissa brisée, anéantie par ces paroles, qui la frappaient lourdement au cœur, une à une, comme les coups d’un lourd marteau.

Fier de son exploit, satisfait de sa double vengeance, le vicomte se retira. Mais sa joie ne fut pas de longue durée. La justice qui, dit-on, marche pour les puissants avec un pied boiteux, eut des ailes pour lui. Saint-Laurent-sur-Gorre et Rochechouart relevaient du parlement de Paris, qui rendit (25 juin 1513), un arrêt par lequel les cinq meurtriers furent condamnés à être décapités. Savoir : « François de Rochechouart-Pontville en la ville et place publique de Limoges, et sa tête mise au bout d’une lance sur la porte de ladite ville par laquelle on va de Limoges à Rochechouart, et son corps pendu au gibet dudit Limoges. Lesdits Anizi, Lachapelle,Indant et Lenègre au lieu de Saint-Laurent, où le meurtre avait été commis; leurs corps pendus au gibet. Les biens de François de Rochechouart situés en pays de confiscation confisqués, et s’ils n’étaient pas en pays de confiscation, ledit Rochechouart condamné à trente mille livres, et chacun des autres à deux cents livres.

» Condamné en outre ledit Rochechouart en trois mille deux cents livres de dommages-intérêts envers la veuve de Pierre de Bermondet de Cromières et envers Jean Petit,curateur de ses enfants mineurs, outre la provision de douze cents livres ci-devant adjugée, et la rente annuelle et perpétuelle de six cent quarante livres parisis assise sur les seigneuries et héritages appartenant audit de Rochechouart, les plus prochains de la terre et seigneurie de Boscheyron et ses appartenances ;

» Condamné ledit de Rochechouart à payer la somme de douze cents livres pour être employée à bâtir une chapelle en l’église de Panazol, où ledit Bermondet de Cromières a été inhumé, et à l’orner de livres, calice, chazubles et autres ornements d’église, et aussi pour faire une épitaphe de cuivre en ladite chapelle, en perpétuelle mémoire de la construction et fondation de la chapelle et cause d’icelle.

» De plus, condamné ledit Rochechouart en soixante livres de rente annuelle et perpétuelle pour la fondation et dotation de deux chapelains qui seraient tenus alternativement de dire et de célébrerà toujours, par chaque jour, pour l’âme dudit défunt, une messe basse en ladite chapelle; laquelle messe serait célébrée chaque vendredi, avec procession en l’honneur de Sainte-Croix, en mémoire du meurtre commis un vendredi:et seraient tenus lesdits chapelains de célébrer ou faire célébrer perpétuellement, par chacun an, quatre obits, vigiles, landes pour l‘âme dudit défunt Bermondet, le premier le 25 juin, le deuxième le 2 octobre, le troisième le 1er janvier, et le quatrième le 2 avril. La présentation de ladite chapelle appartiendrait toujours aux enfants mâles descendants du défunt, et ceux-ci manquant, aux parents les plus proches.

» Condamné, envers le curateur, en la somme de quarante livres, pour faire deux croix en pierres, dont l’une serait mise au lieu de Saint-Laurent, en la rue et devant le logis où ledit défunt avait été tué, et l’autre en la ville de Limoges; en chacune desquelles croix serait mise une épitaphe pour mémoire perpétuelle. Et pour la tenue féodale et haute justice que le vicomte de Rochechouart voulait avoir èz-terres et seigneuries de Boscheyron, Pollevoy et Bernardins et leurs dépendances, elle fût adjugée aux enfants dudit Bermondet, afin qu’ils la tinssent du seigneur féodal. »

On ignore ce que devinrent les quatre complices de l’assassinat de Pierre Bermondet; il est probable qu’ils reçurent la mort. François de Rochechouart ne put être saisi; il se tint, dit-on, longtemps caché et déguisé en femme dans l’abbaye de la Règle à Limoges, dont l’abbesse était sa parente.

Ce vicomte dissipa tout son bien, se rendit à Rome, on ne sait à quelle occasion, peut-être pour obtenir le pardon de ses forfaits, si nombreux que, sur les charges et informations à la requête du procureur général, le roi commanda à Galiot de Lastours, chevalier, gouverneur et sénéchal de Limoges, de le prendre au corps; pour cet effet, de s’aider de la compagnie du roi de Navarre, qui était à trois lieues du château de Rochechouart. Le roi lui marqua que, s‘il était besoin de plus grande force pour prendre la place, il lui enverrait deux canons.

Le lieutenant de cette compagnie se transporta un jour de Fête-Dieu (1515) au château de Rochechouart, avec quatre cents hommes de cheval et cinq cents hommes de pied; brisa les portes, entra dans le château, fouilla partout sans découvrir le vicomte. On prit les titres, et l‘on fit un dégât que les mineurs Pontville estimaient à cent mille écus, leur maison étant, disaient-ils, l’une de celles de France le mieux pourvues en meubles précieux.

C’est à cette époque, rapporte la chronique locale, que la flèche et les créneaux du donjon de Rochechouart furent rasés, ainsi qu’une tour à droite de la grande porte, et que les plus beaux arbres de la forêt de la vicomté furent étêtés.

L’infortunée dame de Rochechouart, voyant tous les biens de son mari dissipés, voulut au moins conserver son avoir pour ses enfants ; elle obtint une séparation de biens, vécut dans la tristesse pendant une dizaine d’années, puis mourut et fut enterrée dans l’église du prieuré du Châtenet. Le chapitre de Saint-Junien en corps, un grand nombre de prêtres et de religieux assistèrent à ses funérailles. La cérémonie fut faite par le prévôt, qui était en même temps abbé de Saint Jean-d’Angely.

On ne sait pas positivement comment et en quel lieu mourut le vicomte. On croit qu’il finit ses jours dans un couvent à Rome.

 

Claude de Rochechouart-Pontville (1523-1566)

 Claude, vicomte de Rochechouart, seigneur de Maisonnais, de Breuilhèz et autres lieux. En 1543 Claude somma le seigneur de Châteaumorand de démolir le château qui portait son nom. Il en reste quelques vestiges sur un monticule escarpé en face du Châtelard, sur les bords de la Glane.

On ignore les motifs de cet ordre de démolition. Claude acheta en 1555 la baronnie d’Aix; lorsqu’il en prit possession, il fut complimenté par le procureur Mondat; on lui fit présent de deux tasses d’argent doré. Le 10 août 1557 il assistait à la bataille de Saint-Quentin; il y fut fait prisonnier avec plus de trois cents gentilshommes français. A la réformation de la coutume du Poitou, en 1559, Claude se fit représenter par ses procureurs; il remontra que, de tout temps, nul de ses vassaux n’avait en le droit de tenir d’assises en sa vicomté, se

plaignit de ce qu’on en tenait, et demanda justice. Mais l’assemblée, et plus tard le parlement, laissèrent les choses dans l’état où elles étaient.

Sous le vicomte Claude le calvinisme s’introduisit dans la vicomté. Ayant appris que quelques nouveautés religieuses circulaient autour de Rochechouart, il défendit de recevoir cette nouvelle doctrine. Le 3 avril 1561 il fit publier à son de trompe et défendre à tous les ministres et prédicants de prêcher et de dogmatiser en particulier ou en public en la ville et terre de Rochechouart, s’ils n‘avaient une permission de l’évêque de Limoges ou de ses vicaires généraux. Malgré cette défense, un nommé Jean Lespinasse, pédagogue, c’est-à-dire instituteur, s’avisa de semer, la nuit et le jour, les nouvelles opinions dans la maison de ville. Irrité de voir transgresser ses ordres par un mauvais conducteur d’enfants, le vicomte le fit arrêter par Louis de Rochechouart son fils, assisté de Louis Paulte, Jacques Du Dousset et René Brejou, écuyers, ses capitaines. Au moment de son arrestation, approuvée par le roi, il dogmatisait en secret au milieu de trois cents auditeurs.

Il était nanti de livres de sa secte, et répandait l‘erreur avec beaucoup de zèle. Traduit à Poitiers pour son procès, on ignore ce qu’il devint. Par ses doctrines subversives cet homme avait troublé toutes les têtes et semé la discorde dans notre petite ville. Les habitants de Rochechouart, jusque là si doux,si paisibles, devinrent turbulents, querelleurs, frondeurs; des révoltes causèrent à plusieurs familles de grands dommages et bien des chagrins.

L’instituteur, dans les campagnes, est un homme important; sa charge est une sorte de sacerdoce; il doit la remplir avec la crainte de Dieu. Nul ne peut faire plus de bien ou plus de mal.

Malgré les efforts du vicomte, peut être parce qu’il en faisait trop, le protestantisme s’implantait à Rochechouart. Des chefs de famille assez influents firent venir un ministre et le rétribuèrent; mais le zèle se refroidit bien vite et les bourses se fermèrent. Le ministre se retira en 1600, ne trouvant pas deux ou trois religionnaires qui promissent de lui donner des gages suffisants. Des confrères plus faciles le remplacèrent; il fallait avoir souvent recours à des ministres étrangers.

Le temple des protestants occupait l’emplacement de la cour et du jardin de M. Ribierre, derrière la maison de M. Marquet-Lavergne, ancien maire de la ville. Le ministre habitait la maison attenant à la rue qui conduisait au temple,et que l’on appelle encore aujourd’hui rue du Temple. Le cimetière protestant fut d’abord sur la place; plus tard, le cimetière de Beaumoussou, divisé en demi-parties, servit aux catholiques et aux protestants.

Le temple de Rochechouart dépendait du consistoire de Saint-Maixent en Poitou; fondée par opposition au seigneur plutôt que par conviction religieuse, cette petite église végéta jusqu’à la révocation de l’édit de Nantes.

A cette époque le vicomte, mécontent de l’opposition des habitants de Rochechouart, les dénonça et les livra aux persécuteurs. Plusieurs se réfugièrent en Hollande et en Angleterre.

Parmi les familles qui eurent le plus à souffrir on cite les Chemison, les Lachaumette, les Labrunie, les Rondeau et les Marcillac. Le temple fut fermé et peu de temps après démoli.

Depuis, il n’y eut plus que des calvinistes secrets. A la révolution de 89 il ne restait qu’un seul protestant : c’était un vieillard nommé Marcillac, d’assez bonne composition du reste, car le cher homme allait à la messe. Ainsi s’est terminé le calvinisme à Rochechouart.

Le vicomte Claude avait épousé Blanche de Tournon, fille de Just, seigneur de Tournon, diocèse de Valence, chevalier de l’ordre du Roi, et de Jeanne de Rissac. Leur contrat de mariage est du 5 mai 1535. Les témoins étaient : Jean de La Rochefoucauld, évêque de Mende et oncle de Claude ;François, cardinal de Tournon ; Jacques de Tournon, évêque de Viviers, et Charles de Tournon, évêque de Valence. Le premier, oncle, et les deux autres frères de Blanche, qui eut vingt-quatre mille livres de dot. Depuis, par acte du 30 mai 1550, le vicomte lui assigna pour rente de douaire six cents francs sur la terre d’Aix.

De ce mariage naquirent deux enfants : Louis, Marie-Anne, mariée à Claude de Châteauvieux, baron de Fromental.

 

Louis I de Rochechouart-Pontville (1566-1604)

 Louis I, vicomte de Rochechouart, baron de Mauzé et de Montmoreau, chevalier de l’ordre du Roi, capitaine de cinquante hommes d’armes de ses ordonnances. Il rendit, d’après Nadaud, des services importants à la couronne; on ignore de quelle nature; mais il était très bien en cour. Henri III lui écrit de Paris, le 22 septembre 1575, en ces termes :

« Ayant à présent plus grand besoin que jamais d’être assisté et secouru de tous les bons et loyaux sujets et serviteurs de cette couronne, pour résister aux desseings des perturbateurs du repos public, j’ai recours à vous comme a celui qui s’est toujours bien démontré ferme en l’affection et fidélité qu’un sujet doit avoir pour son prince, pour vous prier de me vouloir aider a sortir de ces affaires.

« Comme je sçay que vous avez bon moyen, et à cette fin ayant assemblé vos amis et serviteurs, veuillez vous joindre avec mon cousin le duc de Montpensier, ou venir me trouver aussitôt que vous le pourrez, et vous me ferez service très-à propos, lequel je reconnaîtrai envers vous à jamais et les vostres. Priant Dieu qu’il vous ayt. monsieur de La Rochechouart, en sa sainte garde. Signé :‘ Henri. »

L’adresse est « à M. de La Rochechouart, chevalier de mon ordre. » .

Le vicomte Louis de Rochechouart eut une vie très agitée; il la passa à guerroyer, soit dans les armées du roi, son contre ses voisins. Il tracassa les protestants, qui lui donnèrent beaucoup d’embarras. Ils se révoltèrent plusieurs fois contre lui;

l’opposition était à l’ordre du jour. Plus ils s’agitaient, plus le seigneur les persécutait. Enfin un soulèvement général au lieu; on courut aux armes , et le sang coula dans les plaines de Mariau.

Le 9 mai 1562, il épousa Louise de Clérembaut, qui vécut peu de temps. En 1579, il se remaria avec Madeleine de Bouillé. De son premier mariage il eut deux enfants, Jean, qui suit, et Marie, morte en bas âge.

De Madeleine de Bouillé, il eut cinq enfants : Jean, qui fit la branche du Bâtiment ; René, chef de la branche de Saint Auvent et de Montmoreau ; Joachim ;Anne , religieuse à Saint Saint Pardoux ; enfin Isabelle, qui épousa ; en 1605, Gabriel de Lamberti, baron de Montbrun.

 

Jean II de Rochechouart-Pontville

 JEAN, vicomte de Rochechouart, fils aîné du premier mariage de Louis de Rochechouart avec Louise de Clérembault.

Il épousa, le 11 décembre 1595, Françoise Stuart de Caussade, fille de Louis Stuart de Caussade, dont il eut une fille unique nommée Marie.

A cette époque le protestantisme avait fait des ravages affligeants à Rochechouart et dans les environs. Tous les habitants étaient tombés dans l’indifférence religieuse, et par suite dans le désordre et le libertinage qui en sont la funeste conséquence. La crainte de Dieu seule peut maintenir les hommes dans la sagesse et le devoir.

Le vicomte de Rochechouart et son épouse, désirant ramener au giron de l’Église catholique ceux de leurs vassaux qui s’en étaient éloignés durant les troubles, et dont la moitié professait encore le calvinisme, ne purent trouver de moyen plus efficace, dit le Pouillé, qu‘en fondant un couvent de frères prêcheurs qui, par l’exemple de leur vie et la lumière de leur doctrine, pussent éclairer ces aveugles, leur faire connaître les vérités de la foi et réformer leurs mœurs. Ils fixèrent le lieu du nouveau couvent au prieuré du Châtenet, fondé par les ancêtres du vicomte , réunirent au prieuré les quatre vicairies fondées par le cardinal de Cramaud dans l’église de Biennat, et obtinrent de la province de Toulouse des dominicains, qui vinrent en 1614 es fixer au Châtenet.

Ces religieux vécurent au prieuré jusqu’au moment où les huguenots dispersèrent les moines. Le couvent fut fermé, on n’y fit aucune réparation, et bientôt il tomba en ruines: On voit dans le Pouillé du diocèse que lorsque les frères prêcheurs vinrent fixer leur résidence au Châtenet, des cabaretiers s’étaient emparés des bâtiments, et que l’église servait de grange.

Marie de Rochechouart Pontville (1625-1675)

 Marie, vicomtesse de Rochechouart, mariée le 11 octobre 1640 à Jean, marquis de Pompadour, lieutenant du roi en Limousin. Jean, marquis de Pompadour prit le titre de vicomte de Rochechouart.

De ce Mariage naquirent : Jean, marquis de Pompadour et vicompte de Rochechouart ; mort sans enfants ; Marie, dame de Pompadour et vicomtesse de Rochechouart, mariée le 8 janvier 1674 à François d’Espinay, marquis de Saint-Luc, morte en octobre 1723, laissant pour fille unique Marie-Anne-Henriette, dame de Pompadour, vicomtesse de Rochechouart, qui épousa en 1715 François de Rochechouart-Pontville, de la branche du Bâtiment, qui devint vicomte de Rochechouart et propriétaire du château .

Par cette alliance, comme nous l’avons dit, la branche aînée et la branche cadette se réunirent, vinrent habiter le château, leur commun berceau, et continuèrent la tige des vicomtes de Rochechouart.

François de Rochechouart-Pontville (1696-1744)

Marie- Anne-Henriette d’Espinay-St-Luc, épouse de François de Rochechouart-Pontville, mourut en 1731, laissant à son mari de grands biens et le titre de vicomte .

François, vicomte de Rochechouart, épousa en secondes noces, (1732), Marie-Xainte-Hélène de Trémergat, fille de Cervais Gelai de Trémergat, président aux requêtes du parlement de Bretagne.

Le vicomte mourut une douzaine d’années après son mariage. Sa veuve, Mme deTrémergat, fit plusieurs choses qui ne furent point agréables aux habitants de Rochechouart.

Elle ordonna de fermer avec des grilles de fer toutes les croisées qui avaient vue sur la belle allée de la Charmille; elle intercepta le tour de ville, en faisant murer l’espace qui se trouve à la tête de la promenade de la Charmille, du côté nord; elle fit aussi des changements à la porte du Tourniquet. L‘espace entre la porte du Pic et la cour du château fut couvert d‘un jardin en forme de labyrinthe.

La vicomtesse fit bâtir les écuries, la salle d’audience, et d’immenses greniers au-dessus. Avec ces bâtiments il fut formé une première cour en avant du château, du côté de la ville.

Cette cour n’est autre que la place actuelle du château. La salle d‘audience a été transformée en prison et en hôtel de gendarmerie; les écuries ont disparu. On entrait dans cette première cour par deux portes; l’une, du côté de la Charmille, s’appelait le Tourniquet; l’autre, la porte Dorée, s‘ouvrait près de chez M. Chautrand. La maison Chautrand contenait l’orangerie, la demeure du jardinier et celle du portier. Le pré de la Fuie avait une glacière au milieu, et sur la hauteur opposée à la Charmille un vaste colombier ou fuie. Le pré et le jardin de M. Dervaud formaient le grand jardin de la vicomtesse, qui fit construire une vaste grange dans le haut de ce jardin. Plus tard M. Gonneau, devenu propriétaire de cette grange, la convertit en maison.

A la même époque, l’église de Rochechouart fut réparée aux frais de M. Jean-Victor, duc de Mortemart, prieur de Tounay-Charente et marquis d’Everly en Bray, qui s’intitulait aussi duc de Rochechouart. C’est lors de ces réparations que les ouvriers charpentiers firent un tour de force de leur art, en donnant à la flèche la forme d’une spirale; à première vue on dirait que le vent a tordu la pointe de cette flèche. On trouve ailleurs des travaux de ce genre mieux réussis.

Paris possède une rue, une barrière, un faubourg qui portent le nom de Rochechouart. Ce quartier, qui date du commencement du XVIII° siècle, est mentionné pour la première fois sur le plan de Paris de 1756, par l’abbé de Lagrive. L‘auteur du Dictionnaire des Rues de Paris suppose que ce quartier doit son nom à Marguerite de Rochechouart de Monpipeau, abbesse de Montmartre, morte en 1727. Le nom de la famille de Rochechouart a été jugé assez illustre pour désigner tout ce quartier de Paris.

 De François de Rochechouart et de dame de Trémergat naquirent le vicomte Louis-François-Marie-Honorine, et plusieurs enfants morts en bas-âge.

Louis-François-Marie-Honorine, vicomte de Rochechouart-Pontville (1744-1776)

Encore très jeune, il obtint un brevet de cornette dans le régiment des Cars; il y fut capitaine en 1750.

Le 22 juin 1757 le vicomte Louis-François-Marie-Honorine se maria avec Marie-Victorine Boucher, âgée seulement de douze ans; elle était fille de feu Jean-Baptiste Boucher, écuyer, trésorier général des colonies françaises en Amérique. Le roi signa leur contrat de mariage. Cette dame, très riche, releva, dit-on, la maison de Rochechouart ; elle eut en dot une grosse somme d’argent, le comté de Bridiers et les baronnies de Cros et de Rhodes.

En 1759 le vicomte de Rochechouart fut fait colonel du régiment de Bourgogne-cavalerie. Il enrôla dans son régiment, mais au service du roi, plusieurs habitants de Rochechouart : François Gourseaud de Boischevet, Migçon, Boutinaud, qui fut surnommé depuis Talleyrand, parce qu’il quitta le régiment de Bourgogne pour servir dans le régiment de Talleyrand-Périgord; Siméon, Beaudequin, etc. Tous ces militaires servirent dans la guerre de Sept-Ans.

Le 19 juillet 1762 l’évêché de Limoges rendit un arrêté par lequel le titre de prieuré de Saint-Sauveur de Rochechouart fut supprimé, et l’annexe de Biennat érigée en cure entièrement distincte.

En possession de la grande fortune de sa dame, le vicomte de Rochechouart fit embellir son château. Dans la cour intérieure il fit construire une galerie soutenue par des colonnes torses  cannelées. Des statues, des tableaux, des portraits de famille ornaient cette galerie. Au midi il fit élever une terrasse soutenue par un mur voûté, et un balcon avec un double escalier pour descendre sur la terrasse. Ce balcon, ce double escalier et cette terrasse sont d‘un bel effet et d’une grande utilité pour le château. Il fit abattre jusqu’à hauteur d’appui la tour des anciens remparts, au couchant et y fit placer un grand bassin en plomb avec un jet d’eau alimenté par la source qui entretient les fontaines de la ville, et dont le seigneur avait le tiers. Il fit disparaître les antiques croisées coupées par des croix en pierre, et les remplaça par de grandes fenêtres, qui rendent l’aile des bâtiments où elles se trouvent la plus régulière du château. Il fil ouvrir un chemin partant de la seconde cour du château et allant aboutir au chemin qui longe la rivière de Grennes. Un portail établi au bas en interdisait l’usage aux personnes étrangères au manoir.

De puis 89 ce chemin, la Charmille et la promenade des Allées sont devenus propriété publique.

Le 25 octobre 1779 le vicomte François-Louis-Marie-François-Honorine mourut à Paris, à l’âge de quarante-cinq ans. De son mariage avec dame Marie-Victorine Boucher naquirent trois enfants : Armand-Constant ; Michelle-Marie, qui épousa le comte de Montagu-Lomagne ; Agathe-Antoinette-Aimée, qui mourut à Paris, à l’âge de huit ans. Son corps, transporté à Rochechouart, fut enterré au Châtenet.

L vicomtesse arriva à la tourmente révolutionnaire et paya de sa tête son origine noble. Elle fut déclarée suspecte et arrêtée. Elle fut guillotinée à Paris, âgée de 48 ans, le 3 floréal, an III(22 avril 1794).

Armand-Constant de Rochechouart-Pontville (1759-1832)

Armand-Constant, dernier vicomte de Rochechouart et le dernier de la famille de Rochechouart-Pontville. Il était, en 1788, capitaine au régiment d‘Artois-dragon-infanterie, et se trouvait dans les camps au moment de la révolution de 89.

Ses titrés étaient : vicomte de Rochechouart, comte et baron des Bâtiments, comte de Bridiers, baron de Rhodes et de Cros, seigneur de Chaillac et de Saillac, etc.

En 1791, il émigra et se rendit en Allemagne où il étudia la médecine. Revenu à Rochechouart en 1815, il vécut, très retiré, dans son château qui ne lui fut officiellement rendu qu’en 1822.

Tous les ans, il allait passer quelques mois à Paris, et ce fut dans ces voyages qu’il mourut, le 27 juin 1832. Il n’avait jamais été marié, et en lui s’éteignit la branche de Rochechouart-Pontville.

Après la mort du dernier vicomte de Rochechouart, son manoir fut vendu à la barre du tribunal de première instance de la Seine, et acheté par M. le général comte de Rochechouart qui a revendu cette demeure seigneuriale, berceau de sa famille, au département de la Haute-Vienne et à la ville de Rochechouart en 1836.

 

Sources:

  1. Abbé DULERY  – ROCHECHOUART -Histoire, Légendes, Archéologie
  2. ctave MARQUET – Documents Historiques sur Rochechouart et Bienac